la_poesie_des_grands_auteurs_2

trait



a_l_homme_de_victor_hugo

C'est parce que je roule en moi ces choses sombres,
C'est parce que je vois l'aube dans les décombres,
Sur les trônes le mal, sur les autels la nuit,
C'est parce que, sondant ce qui s'évanouit,
Bravant tout ce qui règne, aimant tout ce qui souffre ;
J'interroge l'abime, étant moi-même gouffre ;
C'est parce que je suis parfois, mage inclément,
Sachant que la clarté trompe et que le bruit ment,
Tenté de reprocher aux cieux visionnaires,
Leur crachement d'éclairs et leur toux de tonnerre ;
C'est parce que mon coeur, qui cherche son chemin,
N'accepte le divin qu'autant qu'il est humain ;
C'est à cause des tous ces songes formidables,
Que je m'en vais, sinistre, aux lieux inabordables,
Au bord des mers, au haut des monts, au fond des bois.
Là, j'entends mieux crier l'âme humaine aux abois :
Là, je suis pénétré plus avant par l'idée
Terrible, et cependant de rayons innondée.
Méditer, c'est le grand devoir mystérieux ;
Les rêves dans nos coeurs s'ouvrent comme des yeux,
Je rêve et je médite, et c'est pourquoi j'habite,
Comme celui qui guette une lumière subite,
Le désert et non pas les villes ; c'est pourquoi,
Sauvage serviteur du droit contre la loi,
Laissant derrière moi les molles cités pleines
De femmes et de fleurs qui mêlent leurs haleines,
Et les palais de rires et de festins,
De danses, de plaisirs, de feux jamais éteints,
Je fuis, et je préfère à toute cette fête,
La rive du torrent farouche, où le prophète
Vient boire dans le creux de sa main en été,
Pendant que le lion boit de l'autre côté.

ecussons_d_argent

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